Alors que les politiques mondiales visant la neutralité carbone s’accélèrent, les exportateurs agroalimentaires africains se trouvent à un tournant décisif : comment mener une action climatique ambitieuse tout en restant équitable ? Une table ronde sur le commerce vert, organisée par ODI Global, TradeMark Africa et le Fairmiles Consortium à Nairobi le 8 décembre 2025, a réuni des compagnies aériennes, des exportateurs, des experts en logistique, des chercheurs et des partenaires de développement afin d’aborder cette question urgente. Leur conclusion ? La transition verte doit être à la fois efficace sur le plan environnemental et socialement juste, sous peine de compromettre les moyens de subsistance de millions de personnes qui dépendent de l’économie d’exportation africaine. Le commerce international est une voie éprouvée de développement économique, mais il existe des risques de réduction de l’accès au marché en raison de la conception et de l’application de certaines mesures climatiques liées au commerce.
Les mesures climatiques européennes telles que le règlement de l’UE sur la déforestation (EUDR) et le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (CBAM) transforment rapidement les marchés agroalimentaires mondiaux, compte tenu de l’inclusion des engrais, mais aussi du transport maritime et aérien. La table ronde a mis en évidence l’impact que ces politiques ont déjà sur les exportateurs, les producteurs et les chaînes d’approvisionnement, compte tenu des réactions des détaillants, ce qui oblige à repenser la manière dont les produits frais de grande valeur parviennent aux consommateurs.

James MacGregor, de Fairmiles, a averti que les décisions prises dans les salles de réunion des acheteurs européens de produits horticoles et frais ont des répercussions sur l’ensemble des chaînes de valeur en Afrique. « Les acheteurs doivent aller au-delà des seuls indicateurs et coûts liés au carbone », a-t-il déclaré. « Ils doivent tenir compte de l’impact de ces décisions sur les moyens de subsistance des petits agriculteurs, des travailleurs et des communautés dont les revenus dépendent de ces exportations. »
Jodie Keane, chercheuse principale à l’ODI Global, a souligné le risque d’une transition écologique mal conçue : sans preuves solides, sans mécanismes de tarification équitables et sans technologies adaptées à la réalité des producteurs, la transition écologique pourrait devenir « destructrice sur le plan économique plutôt que transformatrice sur le plan environnemental ». Elle a appelé à la mise en place de données et d’une communication claires et accessibles afin de démontrer comment des chaînes d’approvisionnement mieux conçues peuvent produire des résultats positifs pour tous.
L’une des préoccupations les plus pressantes de la table ronde était la tendance croissante des acheteurs à réduire les risques en diminuant les importations par fret aérien au profit du fret maritime, malgré le peu de preuves démontrant que cela soit toujours meilleur pour le climat ou les consommateurs. Les participants ont averti que lorsque les coûts associés à la certification, aux crédits carbone ou aux transferts modaux sont directement répercutés sur les agriculteurs, la transition risque de devenir non durable.
Kenya’s recent pilots under the EU-funded BEEEP programme offer a glimpse of what’s possible. By shifting products from road and air to a combination of rail Standard Gauge Railway (SGR) and refrigerated sea shipping, these trials have maintained freshness and reduced emissions. However, Clement Tulezi of the Kenya Flower Council highlighted the trade-offs: moving to sea freight often requires different crop varieties, new post-harvest treatments, stronger cold-chain systems and investment in inland consolidation hubs are critical to success. Without these, smallholder farmers, who form much of the export base, risk exclusion from lucrative EU markets.

Les compagnies aériennes proposent des alternatives pour atténuer les effets du changement climatique, telles que des programmes de compensation carbone et des options de carburants durables pour l’aviation (SAF), comme l’a indiqué Zlatic Zlatko de Lufthansa Cargo. Si l’approvisionnement en SAF reste aujourd’hui coûteux et rare, les leaders du secteur prévoient une baisse des prix à mesure que la demande augmentera. Dans un contexte où des millions de moyens de subsistance dépendent des exportations de produits frais, la notion de transition juste a été un thème récurrent tout au long du débat.
Le consensus était que ni le fret aérien ni le fret maritime ne peuvent à eux seuls garantir l’économie d’exportation de l’Afrique dans un avenir à faible émission de carbone. Ils ont conclu qu’il fallait une stratégie multimodale équilibrée, étayée par des données solides et une politique cohérente reflétant les réalités complexes des chaînes d’approvisionnement africaines. James MacGregor a souligné qu’une transition équitable dépendait du partage des coûts climatiques entre les détaillants et les consommateurs des destinations d’exportation. « Les dépenses liées au climat ne peuvent pas être simplement répercutées sur les producteurs africains », a-t-il déclaré. Jodie Keane a ajouté qu’il fallait « éviter la pression verte. Nous devons nous efforcer de trouver des solutions qui soient à la fois bonnes pour le climat et commercialement viables ».
David Beer, PDG de TradeMark Africa, a fait écho à ce sentiment en soulignant que la décarbonisation et le développement doivent aller de pair. « La transition doit être verte, mais elle doit aussi être équitable », a-t-il conclu.
